L’EMDR est une méthode de plus en plus utilisée pour traiter les traumatismes psychiques, notamment chez les personnes souffrant de stress post-traumatique. Reconnue pour son efficacité dans la désensibilisation des souvenirs douloureux, cette approche thérapeutique suscite également des interrogations légitimes sur ses effets secondaires. Certains patients rapportent des réactions inattendues, tant physiques qu’émotionnelles, dans les heures ou les jours suivant une séance. Ces réactions doivent-elles inquiéter ? Sont-elles fréquentes ? Et surtout, que révèlent-elles sur le processus de guérison engagé ? Comprendre ces manifestations secondaires, parfois déstabilisantes mais souvent transitoires, permet d’aborder l’EMDR avec plus de lucidité et de sérénité.
Avant d’aborder ses effets secondaires, il convient de rappeler le principe de fonctionnement de cette méthode thérapeutique. L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing), soit en français « désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires », repose sur l’idée que les souvenirs traumatiques peuvent être retraités à l’aide d’une stimulation sensorielle bilatérale, souvent via des mouvements oculaires guidés par le thérapeute.
Durant la séance, le thérapeute guide le patient à travers une série de stimulations, visuelles (mouvements des yeux), auditives (sons alternés) ou tactiles (tapotements bilatéraux), pendant que celui-ci se remémore un souvenir traumatique. Cette alternance stimule les deux hémisphères cérébraux et permettrait d’activer les processus naturels d’auto-guérison du cerveau. Il ne s’agit pas d’effacer les souvenirs, mais de les retraiter jusqu’à ce qu’ils perdent leur charge émotionnelle perturbatrice.
Ce processus peut parfois être très intense. Il mobilise la mémoire émotionnelle, fait émerger des sensations oubliées et oblige le patient à entrer en contact avec des éléments douloureux. Pourtant, c’est précisément cette réactivation qui permet une intégration durable et une diminution des symptômes post-traumatiques.
Effets secondaires courants de l’EMDR : un processus normal de guérison
Dans la majorité des cas, les effets secondaires de l’EMDR ne sont pas le signe d’un problème, mais plutôt l’expression d’un travail psychique profond en cours. Après une séance, il est courant de ressentir une certaine fatigue mentale, une émotivité accrue ou encore des troubles du sommeil. Il arrive aussi que des émotions enfouies, longtemps réprimées, fassent irruption de manière inattendue.
Certains patients disent avoir du mal à s’endormir, d’autres se sentent émotionnellement à fleur de peau ou rêvent intensément. Ce phénomène est particulièrement fréquent après les premières séances, lorsqu’un souvenir très douloureux vient d’être traité. Il arrive également que des souvenirs longtemps oubliés refassent surface, ou que des images mentales surgissent spontanément dans les jours qui suivent la séance.
Chez certaines personnes, un sentiment de vulnérabilité temporaire s’installe. Il peut s’agir d’une impression de flottement, d’une sensibilité accrue aux bruits ou aux interactions sociales, voire d’une difficulté à se concentrer. Ces états sont généralement transitoires et marquent une phase d’ajustement de l’équilibre psychique.
Jusqu’à 68 % des patients EMDR présentent des effets transitoires dans les 72 heures suivant une séance, en lien direct avec l’intensité du souvenir traité.
Une étude menée par l’Université de Maastricht en 2021
Ces effets, bien que parfois déstabilisants, sont souvent temporaires et peuvent être interprétés comme des signes que le cerveau poursuit son travail d’intégration, même après la séance.
Symptômes perturbants après l’EMDR : quand les effets secondaires impactent le quotidien
Dans certains cas, les réactions post-séance ne se limitent pas à une simple fatigue. Elles peuvent impacter temporairement le quotidien et surprendre par leur intensité. Certaines personnes évoquent une anxiété accrue, un retour d’émotions douloureuses ou un sentiment de confusion passagère. Il peut s’agir aussi de rêves agités ou d’un regain de pensées envahissantes liées au trauma.
La vie quotidienne peut alors être perturbée par une agitation mentale inhabituelle, une humeur instable ou un besoin de repli. Ces états ne signifient pas que la thérapie échoue. Ils témoignent plutôt de la profondeur du processus engagé. Le cerveau, en revisitant des souvenirs enfouis, fait remonter des éléments associés qui n’avaient pas encore été pleinement intégrés. Ce travail interne peut être perçu comme un déséquilibre momentané, parfois inconfortable, mais souvent nécessaire à la restructuration psychique.
Dans certains cas plus rares, les patients peuvent également ressentir un désintérêt passager pour leurs activités habituelles, une tristesse diffuse ou une hypersensibilité émotionnelle prolongée. Ces signes méritent une attention particulière, surtout s’ils persistent, car ils indiquent la nécessité d’un soutien thérapeutique renforcé.
Il est alors recommandé d’en parler rapidement au thérapeute, afin d’ajuster le rythme des séances, de renforcer l’ancrage émotionnel entre deux séances ou de réorienter temporairement le travail. La communication thérapeutique devient un outil essentiel pour traverser ces phases sans interruption du processus.
Réactions physiques liées aux effets secondaires de l’EMDR
L’EMDR ne mobilise pas seulement les émotions : le corps peut lui aussi être traversé par des réactions inattendues. Il n’est pas rare que des patients ressentent des tensions musculaires, des maux de tête, voire des nausées après une séance.
Parfois, ces sensations physiques semblent inexplicables ou disproportionnées. Pourtant, elles sont cohérentes avec les mécanismes de mémoire corporelle : certains traumatismes s’impriment dans le corps autant que dans l’esprit. Pendant une séance, le fait de réactiver un souvenir peut réveiller des sensations physiques associées à l’événement initial.
Des frissons, une respiration plus rapide ou des sensations de chaleur ou de froid peuvent également survenir, traduisant une réponse somatique au travail en cours. D’autres personnes évoquent des douleurs localisées dans certaines parties du corps, qui coïncident parfois avec des traumatismes passés. Ces manifestations, bien que surprenantes, sont le plus souvent bénignes et passagères.
Comprendre que le corps garde la trace des traumatismes aide à mieux accepter ces effets. Le thérapeute peut alors proposer des techniques de recentrage, de respiration ou d’ancrage pour faciliter le retour à un état de calme corporel.
Interpréter les effets secondaires de l’EMDR : une lecture thérapeutique essentielle
Les effets secondaires ne doivent pas être vus comme des signes négatifs. Ils traduisent plutôt la dynamique du changement en cours. Lorsqu’un traumatisme est réactivé dans un cadre sécurisé, il est normal que l’organisme réagisse. Le trouble n’est pas la séance elle-même, mais ce que le souvenir provoque lorsqu’il est touché de nouveau.
Le thérapeute joue ici un rôle essentiel : il prépare le patient, l’informe et reste à l’écoute de ses ressentis post-séance. Le fait de verbaliser les réactions observées permet souvent de les désamorcer. Mieux encore, cela contribue à renforcer le sentiment de sécurité nécessaire pour que le processus se poursuive sans blocage.
Chaque personne réagit à sa manière. Pour certains, les effets secondaires sont quasiment inexistants. Pour d’autres, ils sont plus marqués, mais diminuent au fil des séances, à mesure que les souvenirs perdent de leur intensité émotionnelle. C’est pourquoi il est important d’aborder l’EMDR avec confiance, mais aussi avec une conscience claire des possibles réactions transitoires. Il ne s’agit pas de les éviter, mais de les traverser avec accompagnement.
Plusieurs thérapeutes intègrent aujourd’hui une phase de « débriefing post-séance » pour aider le patient à mettre en mots ce qui s’est joué intérieurement. Cette étape permet de poser un cadre, de valider les ressentis et de rassurer sur le sens des réactions ressenties. L’implication active du patient dans ce processus est également un levier de consolidation du changement psychique.
Effets secondaires de l’EMDR : entre réactions normales et signaux à écouter
L’EMDR est une thérapie puissante, mais comme tout processus de transformation intérieure, elle peut s’accompagner de secousses émotionnelles ou physiques. Ces effets secondaires ne sont pas des effets indésirables au sens strict, mais plutôt des signes que quelque chose bouge, s’ouvre et se réorganise à l’intérieur.
Plutôt que de les craindre, il s’agit de les reconnaître, de les accompagner et d’en parler. Ce travail, qui peut parfois déstabiliser, est aussi porteur d’une reconstruction plus apaisée. En étant bien informé, le patient peut aborder l’EMDR avec plus de sérénité, en sachant que ces réactions sont fréquentes, compréhensibles, et souvent temporaires.
Savoir distinguer les réactions normales de celles qui nécessitent un ajustement permet de sécuriser le parcours thérapeutique. La confiance dans le processus, le lien de collaboration avec le thérapeute et la capacité à se mettre à l’écoute de soi sont des ressources précieuses pour franchir chaque étape avec plus de stabilité.